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Photo du rédacteurRegroupement Naissances Respectées

« Je vous ai déjà dit que c’était normal de saigner! [...] vous me faites perdre mon temps »

Je me présente à la clinique pour une hystéroscopie, un examen au cours duquel on entre une minuscule caméra dans l’utérus pour en visualiser la paroi interne. Afin d’en ouvrir et d’en étirer les parois, un petit jet d’eau est aussi envoyé dans l’utérus, que ce dernier perçoit comme un corps étranger. Les parois de l’utérus s’étendent alors, permettant de bien en visualiser l’intérieur.

Le médecin, qui n’est pas mon médecin traitant et que je n’ai jamais vu, me dit que c’est possible que ça provoque de petites crampes. On entre tout le nécessaire par le col de l’utérus, et l’examen commence. Les possibles « petites crampes » s’avèrent dans mon cas être violentes : j’ai rapidement mal à un point tel que la pièce semble tourner autour de moi. « Oh, vous avez de petites crampes? » qu’il me dit. Je lui explique que j’ai excessivement mal et que tout tourne: j’ai peur de tomber de la table d’examen. L’infirmière, plus empathique que son collègue, vient près de moi et m’offre de me tenir la main. Elle me rassure et me dit que l’examen ne durera pas longtemps. Une fois l’examen terminé, le médecin retire le tout, les crampes se calment, et il me dit presqu’en riant que je suis très sensible. Il me dit aussi qu’il est possible que j’aie « de petits saignements marrons » au cours du reste de la journée, sans toutefois préciser à quelle couleur ni à quelle quantité de sang je dois m’attendre, ni si je dois avertir la clinique dans le cas où le saignement perdurerait ou deviendrait plus abondant. On m’envoie me changer dans la salle de bain, et je remarque ce que je considère être un saignement très rouge et abondant lorsque je me relève de la toilette. Je m’habille et je vais demander conseil auprès de l’infirmière à qui j’ai tenu la main. Je lui décris ce que j’ai vu et lui fais part de mon inquiétude, alors elle juge bon de me faire dévêtir, de m’installer sur la table d’examen à nouveau et de rappeler le médecin pour qu’il vienne vérifier si le saignement est normal. Ce dernier arrive, visiblement irrité. Il m’examine, tamponne du sang sur mon col de l’utérus avec un morceau de gaze. D’un ton autoritaire et en colère, il me montre le tampon plein de sang et me dit : « Madame, ça, c’est du sang marron! C’est marron, ça! Je vous ai déjà dit que c’était normal de saigner! Vous vous en faites vraiment trop et vous me faites perdre mon temps. » Il s’apprête à sortir de la pièce en maugréant, l’infirmière mal à l’aise me fait un air qui semble vouloir dire : « Je suis désolée, ce médecin-là a mauvais caractère. » Tout juste avant que le médecin ne soit complètement sorti de la pièce, je lui ai dit : « Monsieur, je préférais être prudente. Je m’en ferais peut-être moins si je n’avais pas déjà failli mourir au bout de mon sang. » Son visage s’est un peu adouci, mais il est tout de même parti l’air fâché, sans rien me dire. J’étais au moins contente d’avoir osé lui répondre. Ça s’est passé dans un endroit privé où j’ai payé le gros prix pour ces services. Mon médecin traitant, lorsque je lui ai raconté cet épisode, m’a dit que je pouvais porter plainte. On m’a parlé de formulaire, de numéro de téléphone, possiblement de fax… je ne suis plus certaine. Ça paraîtra peut-être paresseux ou faible, mais ça m’a semblé compliqué. J’avais mon infertilité à gérer, mes autres tests à poursuivre, mes traitements à envisager, mes deuils de grossesse à métaboliser. Je n’avais pas envie de me lancer dans un autre processus compliqué et possiblement confrontant, duquel je ne savais pas réellement à quoi m’attendre, alors je n’ai pas porté plainte. On pourrait croire que ce médecin ayant pratiqué mon hystéroscopie n’a pas été violent; qu’il n’a été que soupe au lait, irritable, qu’il n’avait peut-être qu’une mauvaise journée. C’est possible. Mais selon moi, quand tu fais ton (gros) salaire, ta renommée, ton prestige, ta carrière grâce à des couples, des femmes infertiles, tu te dois de ne pas les mépriser et de ne pas les traiter comme des imbéciles tandis qu’elles ont les jambes écartées et les pieds dans les étriers. Tu te dois de respecter la vulnérabilité sur le dos de laquelle tu fais ton pain et ton beurre.

Le manque de respect de la part d’une personne en position d’autorité et dont le portefeuille bénéficie de ton drame personnel, c’est aussi une forme de violence, à mon humble avis.

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